Mon aventure Sauvage déréliction

Publié le par Lucie Delarosbil

J’ai écrit le premier Sauvage déréliction en 2005, lors d’une session d’études en création littéraire à l’Université Laval, à la suite du suicide de mon frère le 4 février. En effet, lorsque cet événement survint dans ma vie, je suivais un séminaire de maîtrise en poésie avec monsieur Jean-Noël Pontbriand, professeur et illustre poète. Je devais produire un journal d’écriture et un « mini » recueil de poèmes pour le mois de mai. Ce que je fis malgré le deuil difficile que je vivais.

À la fin, quand je rencontrai mon professeur, il me suggéra de poursuivre l’écriture de mon recueil, soit pour mon mémoire de maîtrise, soit pour une édition future. Il ajouta de ne pas laisser mon oeuvre dans mes tiroirs. Je l’écoutai en me disant que l’avenir dira ce qu’il en adviendra. Ainsi, je passai tout l’été à écrire. En automne j’avais terminé.

Les maisons d’éditions

En décembre de la même année, je fis une première démarche avec plus d’une vingtaine de maisons d’éditions québécoises qui publient de la poésie. Je leur envoyai mon manuscrit par la poste et j’attendis des réponses pendant des semaines. Parmi ces maisons, il y en avait deux pour lesquelles mon coeur penchait.

Une autre maison en était une d'édition-concept. On peut situer ce type d’éditions entre les maisons officielles et les éditions à compte d’auteur. Ce fut d’ailleurs la seule qui me proposa un contrat très rapidement, incluant une journée au Salon du Livre de Québec 2006. Je refusai car je n’avais pas encore reçu toutes les réponses que j’attendais, surtout de celles qui me faisaient rêver.

La première réponse arriva par courriel le 29 décembre 2005 ; la deuxième par la poste le 3 janvier 2006. L’une avec une critique constructive de mon écriture, démontrant qu’il avait bel et bien été lu ; l’autre avec une justification qui n’avait absolument rien à voir avec mon texte. En janvier, je reçus neuf accusés de réception m’annonçant la soumission de mon manuscrit au comité de lecture et une attente d’en moyenne trois mois. Seulement quelques maisons les envoyèrent par la poste. Ce qui n’est pas rien.

Aussi, je reçus deux autres réponses par courriel. Le directeur de l’une de ces deux maisons prit même la peine de me téléphoner pour m’expliquer son message sur ma boîte vocale. Le 31, le contrat avec l’édition-concept me fut proposé et une tentation d’accepter m’envahit. De toute ma vie, jamais je n’avais autant rencontré de lettres sur un même thème dans ma boîte, et en si peu de temps, sauf peut-être lors des naissances de mes trois enfants.

Plusieurs maisons ne me répondirent jamais, certaines même après leur accusé de réception. Plusieurs me dirigèrent vers d’autres maisons qui publient des poésies dans mon style.

« Chère poète »

Au cours des mois suivants, je reçus par la poste neuf réponses dont deux en février, une en avril, cinq en mai et la dernière en juillet. Parmi toutes, celle du 28 mai se démarqua par les efforts chaleureux déployés pour mon Sauvage déréliction et pour moi-même. Il vaut la peine que j’en parle. D’autant plus que cette lettre arriva d’une des maisons qui me faisaient rêver.

Tout d’abord, cette réponse fut écrite de la main propre d’un des deux lecteurs de mon manuscrit, le directeur de la maison je supposai. Il débuta avec l’expression « chère poète ». Ensuite, avant de me donner les raisons concrètes du refus justifié par son confrère « un peu plus sévère » que lui, il m’écrivit qu’il l’avait lu « en entier, et avec plaisir » et le qualifia en ces termes : « agréable fluidité, des images quelquefois convenues, surtout intéressantes, originales même, très bonne langue »

Enfin, le lendemain, il rouvrit l’enveloppe pour y ajouter un petit feuillet de suggestions positives de « nettoyage » et de commentaires sur l’ensemble tels que « bonne langue, du souffle, agréable continuité ». Il termina en m’invitant à le retravailler et je le pris avec beaucoup de motivation et de satisfaction. Je l’écoutai donc, lui aussi.

En Gaspésie

Plus tard, j’appris la possibilité de publier quatre textes dans un recueil qui se préparait à être éditer dans mon patelin gaspésien, Paspébiac. Je soumis alors parmi eux la deuxième partie de mon Sauvage déréliction, intitulé « Regard franc ». Il s’agissait du projet Raconte-moi une histoire pour l’événement régional Livres en fête qui eut lieu en avril 2006.

Par la suite, j’entendis parler d’un autre projet, devant avoir lieu sur une période de deux ans, organisé par l’artiste Enid Legros-Wise. Il suffisait de fournir autant de citations que voulu, de vérités venant de moi-même ou d’un écrivain décédé depuis plus de cent ans. Je contactai l’artiste pour en savoir plus. Je fus emballée par son projet et lui envoyai cinq citations tirées de mon Sauvage déréliction.

Véritas 2007 s’avérait génial et très original à mon avis. Elle devait recevoir 1000 citations pour inscrire sur 1000 véri-tasses en céramique de porcelaine qu’elle produisait en 2006 dans le but de les présenter dans ses expositions à venir intitulées Véritas ... à la recherche de notre vérité collective, lesquelles eurent finalement lieu dans quelques villes de la Gaspésie, en été et en automne 2007.

Édition à compte d’auteur

Janvier 2010. Le temps avançait à petits et à grands pas vers le 5e anniversaire du décès de mon frère. Je ne pouvais plus continuer de laisser mon manuscrit à l’abandon, le peaufinant à l’occasion de chaque lecture que j’en faisais depuis quatre ans, me contentant depuis quelques mois des publications sur Facebook (1re et 2e parties) et des chaleureux encouragements de mes amis. En outre, la lecture d’un très beau livre de Marc Chabot sur le suicide et la souffrance humaine, que je venais tout juste de terminer, me réconforta dans ma démarche, et en particulier cette citation : « Chaque suicide mérite un livre. »

Ce fut ainsi que je décidai de l’éditer moi-même en entier. Je me sentis pressée par le temps tout d’un coup. Je commandai un ISBN (j’en reçus 10, ainsi pour mes 9 prochains livres). En attendant, je conçus et réalisai le montage de mise en page avec la photo de couverture. ISBN en main que je mis sur papier, je soumis le tout à un imprimeur qui me présenta une première épreuve que je dus corriger. La seconde épreuve s’avéra finale. Je n’utilise pas le mot « parfaite » car je sais qu’on peut passer sa vie à embellir une oeuvre. Car il faut une fin, définitive, imparfaite, telle la mort vers une autre vie, inconnue.

Déjà, je prépare deux autres publications dans le même format : l’une de mes 25 chansons écrites de 2002 à 2004 et l’autre de mon petit roman épistolaire débuté en janvier 2005 que je prévois poursuivre bientôt. Sauvage déréliction est dédié « à mon frère pour mes parents en son souvenir ». Le premier recueil, celui du départ de mon aventure, fait la troisième partie et la moitié du livre qui contient 102 pages, le tout enrobé dans un petit format de poche (95 mm x 137 mm) et, sur la couverture, une photo de couleurs sombres.

© Lucie Delarosbil, 2010

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